Linguistique : TDX n°3

Langage humain et communication animale :

Spécificité du langage humain

Le langage est un outil de communication. Il y a langage chaque fois qu’il y a système de signes destinés à transmettre une information : langages naturels (langues humaines, chant d’oiseau) ou artificiels (code de la route, langage informatique). Selon cette définition basée sur les théories des communications, toutes les formes de communication animale sont des langages.

Cependant un animal ne peut pas « parler » de faits passés ou futurs, il ne possède pas de syntaxe, ne peut pas « parler » d’autres choses que ses besoins vitaux et son « langage » ne peut pas être décomposé en unités plus petites re-combinables. Il n’y a pas de dialogue entre un homme et un animal car la réponse ne se fait pas sur le même mode (parole-comportement).

Même chez des individus de degré inférieur d’intelligence et pathologique, il existe une maîtrise du langage humain qui n’est pas à la portée d’un singe (même si celui-ci peut dépasser l’homme dans d’autres domaines).

On a essayé d’apprendre le langage de l’homme à des chimpanzés mais on a été obligé de passer par le langage des signes (à cause de la forme du conduit vocal qui est droit chez ces singes et coudé chez l’homme). L’expérience débute en 1966 sous la direction de l’Américaine Garquer avec une femelle chimpanzé (Washoe). Au bout d’un mois elle peut utiliser plus de cent signes du langage des signes américain. Au bout d’un an elle commence à associer des mots (moi dedans) puis des formes plus complexes (toi moi sortir) et invente des nouveaux mots avec ceux qu’elle possède en les associant. Elle apprendra ce langage à ses congénères. On a réussi la même expérience avec une femelle gorille (300 mots en cinq an). Un autre chimpanzé a réussi à symboliser des catégories plus abstraites (légumes, outil).

Mais cette communication ne répond qu’à des besoins ou des réponses. Il y a toujours interaction. Il n’y a jamais d’émerveillement, d’interrogation, de récit… « Les singes peuvent donc parler mais n’ont pas grand chose à dire. »

Dans les deux tableaux, étudiés ci-dessous, toutes les capacités sont réunies chez l’homme mais c’est critiquable car on a pris le langage humain comme référence. On va tout de même tenter de discerner les spécificités du langage humain :

Étude du tableau de Hockett :

Dualité, double articulation :

Éléments dépourvus de sens qui, entre eux, ont un sens : phonèmes dans le langage humain. Il semblerait que ce soit une des particularités du langage humain. Un message peut être découpé en unité de première articulation (monème : mot avec un signifiant et un signifié) puis en unités plus petites de deuxième articulation (phonème avec un signifiant mais pas de signifié).

Productivité :

Capacité de création de nouveaux messages. Ce n’est pas spécifique à l’homme. (ex : les abeilles produisent des messages avec des données différentes en fonction de l’orientation, la distance… de leur but).

Arbitraire du code :

Chez les animaux il n’y a pas d’arbitraire ou peu (ou alors on ne le sait pas). L’arbitraire serait donc plutôt spécifique au langage humain.

Interchangeabilité :

Possibilité d’intervertir émetteur et récepteur. Ce n’est pas spécifique à l’homme.

Spécialisation :

Langage qui permet de déclencher une réponse chez le récepteur. Ce n’est pas spécifique à l’homme.

Déplacement :

Possibilité dans un message de renvoyer à des éléments éloignés dans l’espace et dans le temps. Ce n’est pas spécifique à l’homme.

Transmission culturelle :

Selon le tableau, seul l’homme a une culture.

Étude du tableau de Corraze :

Le dialogue est la condition du langage humain : il implique une réponse sur le même mode. Le langage humain ne se réfère pas uniquement à des données objectives. (Il peut se référer à lui-même, à des données imaginaires, à des discours rapportés, au passé ou à l’avenir).

Par contre, le mensonge n’est pas le propre de l’homme. Certains merles lancent de faux cris d’alarmes pour récupérer toute la nourriture en cas de manque de nourriture par exemple.

La réflexivité non plus. Les animaux ont des attitudes différentes selon les situations (pour jouer, pour faire semblant). On a aussi vu certains animaux corriger des erreurs de communication chez leurs congénères.

Le langage humain n’est pas limité par un but en rapport avec les différents besoins vitaux, il est illimité.

Au niveau de la double articulation : on a un nombre limité d’éléments qui constituent le langage humain. A partir d’une trentaine de sons, on peut former des milliers de mots et avec ceux-ci, une quantité infinie de messages contrairement aux animaux où un cri correspond à une situation. À cause de la mémoire humaine qui est limitée, il y a une économie au niveau des éléments utilisés.

On trouve des syntaxes simples chez certains animaux, chaque élément garde son sens propre dans une combinaison. (par exemple, chez certains singes, les mésanges à tête noire qui ont une grammaire. Ce sont les seuls animaux non humain dans ce cas).

Le langage se situe dans le temps et non dans l’espace : linéarité. Ce n’est pas spécifique à l’homme.

Il existe chez l’homme des moyens de dire quelque chose sans le dire réellement.

L’homme peut apprendre d’autres langues alors que ce n’est pas le cas chez les animaux, sauf pour de rares exceptions.

Au final on remarque que le langage humain possède même toutes les caractéristiques des deux tableaux, même si elles ne sont pas toutes spécifiques à celui-ci.

Étude de la communication des abeilles :

On distingue deux types de danses : ronde (ce qui signifie que le butin se situe à moins de 100m) et frétillante (en faisant un parcours en 8 et en frétillant de l’abdomen, ce qui signifie que le butin se situe entre 100m et 6km).

La distance exacte correspond au nombre de figure qu’effectue l’abeille. L’orientation par rapport au soleil indique la direction de la nourriture.

Les abeilles sont donc capables de produire et de comprendre un message contenant plusieurs données, elles peuvent les conserver en mémoire e les communiquer en les symbolisant par divers comportements. Elles sont capables de coder et décoder. Il y a donc un système de signes chez les abeilles. Mais elles sont limitées à certains types de données.

Le message est gestuel et non vocal et implique une réponse comportementale. Les abeilles ne peuvent pas construire un message si elles n’ont pas expérimenté une situation y correspondant.

On distingue trois unités significatives :

-          /danse/ => « présence de nourriture »

-          /ronde/ => « proche » ou /frétillante/ => « éloigné »

-          /orientation vers le soleil/ => « butin orienté vers le soleil » ou /orientation vers le nadir/ => « butin orienté à l’opposé du soleil »

Il s’agit d’un message ininterrompu. Il n’y a pas de découpage dans le temps. Il ne possède qu’une première articulation. Chaque message s’associe à une signifié et s’oppose aux autres messages. Il s’agit donc d’un mode de communication pauvre, limité en messages, à la différence du langage humain.

 

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