Linguistique : CM n°10

La fonction opposée à la norme : Norme(s) et usage

« On ne fait pas de fautes pour le plaisir d’en faire » Ch. Bally (1925).

Norme(s) :

Norme objective : attitude descriptive :

C’est une conception fonctionnelle du langage. Ce que l’on observe : normal, régulier ; ce qui, dans la parole, correspond à l’usage général.

Ex : il est normal de n’utiliser qu’une seule négation.

Le langage répond à des besoins (ex : argots etc.).

L’oral n’est pas un sous-écrit, un écrit fautif.

Norme subjective : attitude prescriptive :

C’est une conception normative : normée. Il y a valorisation de certains usages, liée à la domination de groupes sociaux (Jugement de valeur). « On dit … ; on ne dit pas… ».

Ex : prédominance de l’écrit sur l’oral.

Surnorme : Extension d’une norme adaptée à une situation différente (ex : vouloir « parler » comme on écrit).

Hypercorrection : Formes dites de « prestiges », promotion sociale.

Faute(s) :

Écart par rapport à une (la) norme :

Il faut décrire et expliquer, sans juger.

« Ni la vertueuse indignation du puriste, ni l’exultation joyeuse de l’iconoclaste » A. Martinet.

Ex : « Il est venu malgré qu’il pleuve » (malgré la pluie). En français on a : par => parce que ; pour => pour que ; donc on devrait avoir malgré => malgré que.

Lexique : venir => revenir ; attraper => rattraper ; pourtant : aller => *raller (« Quand je rirai à la foire… » [La guerre des boutons] c’est ce qu’on appelle une licence poétique).

« Bonne faute » : révélation des incohérences de la langue. Le code (la combinatoire) permet de nombreuses combinaisons, mais toutes ne sont pas retenues par la langue.

Conclusion :

-          Un fait de langue a beau être « correct », il peut ne pas être adapté à sa fonction (en situation).

-          Inversement, un grand nombre d’incorrections servent justement ) prévenir ou a réparer de tels déficits.

Besoins langagiers et économie linguistique :

 Pour H. Frei (1929), il y a :

-          besoin d’invariabilité et de brièveté (axe syntagmatique).

-          besoin de différenciation et de clarté axe paradigmatique).

Ex : verbes du troisième groupe => verbes en -er (plus d’invariabilité et moins de brièveté).

« résoudre => solutionner ; recevoir => réceptionner ; entendre => auditionner ».

Ex : verbes du troisième groupe => verbes support + lexème (plus d’invariabilité et moins de brièveté).

« craindre => avoir peur ; recourir => avoir recours ; acquérir => faire l’acquisition ; suivre => aller derrière ».

Satisfaire ces besoins peut conduire à des variations allant jusqu’à la déviance (plus ou moins liberté de code).

Ex :

« Elle a l’air contente »

« Cette soi-disante faute, qui n’en est pas une » (soi-disant ne s’applique qu’à une personne)

« Les rumeurs se sont avérées inexactes »

« Des WC payants, une rue passante » (les objets ne font pas l’action)

Vision dynamique de la langue : les « bonnes fautes » d’aujourd’hui peuvent constituer « la norme d’usage » de demain.

 

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