Psychologie clinique : CM 3&4

Anna Freud (1885-1982), Mélanie Klein et Donald Winnicott

A. Freud :

Eléments biographiques :

Elle a d’abord été institutrice de 1914 à 1920. En 1913, elle commence à lire les œuvres de son père et traduit des articles psychanalytiques. Elle décide plus tard (1918) d’entreprendre une cure psychanalytique avec son père. La première partie se termine en 1922 et A. Freud veut se présenter comme membre de la société psychanalytique de Viennes et rédige  ne communication scientifique afin d’y entrer. Elle reçoit ses premiers patients, des enfants, et s’intéresse aux aspects pédagogiques, d’où des conférences à ce sujets. Elle fonde en 1925 une école destinée à fournir un environnement adéquat à des enfants perturbés. En 1937, elle crée une école pour jeunes enfants de milieux défavorisés en collaboration avec Burlingham. A. Freud fuit le nazisme en 1938 et quitte donc Viennes pour Londres. Elle y fondera une institution pour orphelins en 1940 (Hampstead nursery) qui donnera l’Hampstead child therapy.

Portée théorique :

Elle étudie le développement de l’enfant d’un point de vue de niveau de maturation et de la prédominance des conflits à chaque stade. Elle met en évidence le rôle de l’environnement. Pour elle, la connaissance de l’enfant ne vient pas seulement de l’observation analytique (observation en profondeur) mais aussi de l’observation directe (observation de surface) : les deux méthodes se complètent. Elle fait partie du courant des psychanalystes « généticiens » (Hartmann, Kris, Loewenstein). Hartmann a travaillé sur la psychologie du moi et le rôle de l’environnement. Il travaille avec Kris et Loewenstein à partir de 1940, émigrés à New York pendant la guerre. Ils se sont axés sur la seconde topique (« ça, moi, surmoi) et étudient les fonctions du moi face aux conflits.

Ces auteurs ont beaucoup utilisé la méthode de l’observation directe pour étudier l’enfant et ainsi expliquer l’organisation de la relation d’objet. On peut ainsi confronter les observations avec les reconstructions faites à partir de l’analyse, toujours dans le but d’étudier la naissance du psychisme chez l’enfant. Cette méthode repose cependant sur des comportements conséquents à ce psychisme et non sur l’observation de celui-ci.

Autres figures psychanalytiques :

Margaret Mahler était psychanalyste d’enfant, née en Hongrie en 1897, elle a dirigé le premier centre de guidance psychanalytique à Vienne jusqu’à la seconde guerre mondiale où elle part pour les Etats-Unis. Elle s’est ensuite beaucoup intéressée aux interactions mère-nourrisson dans des lieux particulièrement aménagés (utilisation du miroir sans tain par exemple). Sa théorie s’axe sur la séparation-individuation : la possibilité de se séparer d’autrui et de s’individualiser se construit progressivement et les observations de Mahler cherchent à montrer ces processus, jusqu’à l’autonomie où il y a représentation unitaire de soi et des autres. Mahler a aussi étudié les psychoses chez l’enfant. Elle en distingue deux formes : infantile autistique et asymbiotique.

Spitz, né à Vienne en 1887, devient médecin à Budapest en 1910, travaille avec Ferenzi et fait une analyse avec Freud. En 1938, il s’installe aux Etats-Unis où il exerce en tan que psychanalyste, médecin et chercheur. Il observe aussi les enfants pour établir les premières métathéories psychologiques. Il est aussi connu pour ses travaux sur les l’hospitalisme où l’on observe des attitudes particulières chez des orphelins : repli, automutilations, régressions, maladies, mortalité plus importante, causées par le manque de présence privilégiée, de relation affective, de langage.

 La méthode d’observation directe a permis à ces deux auteurs de mettre l’accent sur l’importance de l’environnement dans le développement psychique de l’enfant ainsi que sur l’état de dépendance du nourrisson vis-à-vis de la mère.

M. Klein :

Eléments biographiques :

Elle a inventé la technique du jeu (jeux, dessins etc.) pour étudier l’inconscient de l’enfant par l’interprétation de ses productions. Elle naît à Vienne en 1882, elle s’installe en 1921 à Berlin comme psychanalyste d’enfants. Elle quitte Berlin et publie « la position dépressive » en 1934.

Eléments conceptuels sur les pulsions :

M. Klein met en évidence l’existence de fantasmes précoces très violents et agressifs chez le jeune enfant, qui visent l’intérieur du ventre maternel et entraîne aussi la crainte d’être agressé en retour. A la deuxième phase orale, elle parle de stade cannibalique et au stade anal elle met en évidence des pulsions d’avidité, d’emprise. Le bébé se représenterait la mère avec une partie « bonne mère » et une autre « mauvaise mère ».

Elle développe la suite des théories de pulsions de vie et de mort à partir de sa théorie et considère que ces deux pulsions coexistent et sont en conflit dès le début de la vie, d’où les fantasmes de destruction et de conservation qui caractérisent les différents stades successifs qu’elle appelle positions.

Les positions :

La position schizo-paranoïde vient en premier : elle est caractérisée par une crainte de la persécution due à l’agressivité projetée et qui fait retour. Puis vient la position dépressive où l’enfant prend conscience que la mère est une seule personne réunissant ses aspects positifs et négatifs. Il y a alors reconnaissance de l’ambivalence de l’objet et de soi-même. Cette découverte entraîne chez l’enfant un sentiment nouveau de culpabilité vis-à-vis de ses pulsions agressives. Cette préoccupation pour l’objet et l’envie de ne pas le détruire, de la restaurer est un point de départ de la pensée et de la symbolisation lorsque cette phase est bien passée. M. Klein pense que l’on retrouve certains éléments psychiques de ces phases durant les étapes importantes de la vie, d’où le terme de positions.

D’un côté on a donc le courant généticien avec A. Freud qui a centré ses recherches sur l’évolution du moi. Pour eux, il n’y a pas de vie psychique dès la naissance, les premiers instants de la vie étant anobjectaux. De l’autre, les kleiniens soutiennent l’existence de pulsions innées, avec un objet. Ils mettent l’accent sur l’intrapsychique plutôt que sur les modalités relationnelles.

D. Winnicott :

Une autre voie sera empruntée par Winnicott, pédiatre. Il a développé les consultations thérapeutiques. Il utilise beaucoup le jeu « libre » (libre expression de soi). Il fait jouer au milieu familial un soutien thérapeutique. Il s’inscrit dans la lignée de Freud, est influencé par M. Klein et a laissé une théorie psychanalytique importante. Il insiste sur l’importance de l’environnement réel et des soins maternels pour le développement de l’enfant (« un nourrisson – tout seul – ça n’existe pas »). Pour lui, on ne peut pas comprendre le nourrisson sans comprendre le fonctionnement psychologique de la mère.

Il s’est beaucoup intéressé à la première année de la vie, où le développement affectif pose les bases de la santé (mentale et psychique). Selon lui, l’enfant a, au début, des informations morcelées sur le monde extérieur et ne peut pas distinguer clairement ce qui vient de lui ou de l’extérieur : l’enfant vit dans un premier temps dans un état de confusion principalement entre lui et la mère. Il passe alternativement entre des états de besoin et de tranquillité accompagnés respectivement d’affects désagréables ou agréables. Cette discontinuité vécue doit être compensée par l’environnement : permanence, continuité des soins (illusion d’omnipotence à l base de la confiance en soi et envers l’extérieur) mais aussi de l’investissement affectif de la mère (heureuse d’apporter des soins par exemple).

Winnicott définit trois fonctions principales des soins maternels : le holding (fonction de maintenance aussi bien physique que psychique), le handling (manière de manipuler le bébé) et l’object presenting (capacité de la mère à présenter  l’enfant l’objet dont il a besoin, au bon moment). Le tout forme la préoccupation maternelle primaire qui est un état particulier de la mère pensant la fin de la grossesse et les premières semaines de vie de l’enfant. Il y aura hyper investissement du bébé pour s’identifier à lui et lui fournir les soins adaptés, avec une certaine inadéquation. La mère a ainsi une fonction inconsciente de traduction intuitive des signaux fournis par le bébé.

Selon Winnicott, un mère suffisamment bonne sait aider l’enfant à dépasser le stade de confusion, à unifier ses sensations pour mettre en place le sentiment continu d’exister (self ; soi). La mère doit aussi être capable de satisfaire les besoins de son enfant mais pas trop complètement par la suite (possibilité de sentiments négatifs par exemple). La mère ne doit pas être « parfaite » pour laisser une marge de frustration qui permettra à l’enfant la possibilité de la substituer soi-même (hallucination de satisfaction puis représentation de l’objet, à l’origine du développement de la pensée) pour attendre et différer la satisfaction en s’appuyant sur sa vie mentale.

Le regard de la mère est comme un miroir pour l’enfant car elle réagit en fonction des expériences du bébé. Il en va de même avec le sourire qui est pour Spitz le premier organisateur de la vie psychique. Il s’agit donc d’échanges, accordages affectifs qui se construisent et transforment les expériences physiques du bébé en expériences psychiques. Le psychisme maternel supplée et enrichit ainsi celui du bébé. En cas de défaillance du « moi auxiliaire » de la mère, le bébé a recours à des expressions corporelles par des troubles psychosomatiques.

 

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